L’École de droit de la Sorbonne annule un partiel de L3 pour triche

Le lundi 15 janvier 2024 à 18:00, les étudiants du groupe 2 de la troisième année de licence de droit de l’université Paris 1 Panthéon-Sorbonne étaient amenés à passer leur partiel de Relations internationales (Droit international public), mais le déroulement de cette épreuve a été entaché d’importantes irrégularités.

Comme chaque janvier depuis plusieurs années, l’université Paris 1 a choisi d’externaliser les partiels de 3ème année de droit à la Maison des Examens d’Arcueil-Laplace. Les étudiants étaient partagés entre 2 salles d’environ 150 étudiants chacunes.

Problème : cette année, une des deux liasses de sujets a été oubliée par le personnel de l’université au coffre, situé au centre Lourcine à Paris (à plus de 20 minutes de trajet). Les surveillants, qui se présentaient comme travaillant pour la Maison des Examens et non pour l’université, ont commencé à distribuer les sujets puis se sont arrêtés sans reprendre les sujets déjà distribués. Les étudiants ont ensuite été laissés à eux-mêmes avec la moitié des sujets distribués pendant plus de 30 minutes.

La moitié de la salle qui a reçu les sujets a rapidement commencé à en discuter entre elle, sous le regard bienveillant des surveillants (l’un d’entre eux leur a même demandé de « parler moins fort », à l’hilarité générale !). Puisque l’examen prenait la forme d’un QCM, même les étudiants qui ne voulaient pas participer à la conversation ont entendu malgré eux les réponses à la majorité des questions.

Le reste des sujets est ensuite arrivé avec plus de 30 minutes de retard et la décision a été prise de commencer l’épreuve. Toutefois, les étudiants ont reçu 3 jours plus tard l’email suivant :

Chères étudiantes, chers étudiants,
Suite aux irrégularités constatées par le jury lors de l’épreuve de Droit international public sans TD avec Mme Daphné Dreyssé (groupe 2) en date du 15 janvier 2024, le jury de la Licence 3 a décidé d’annuler l’épreuve concernée.

Cette décision n’est pas étonnante, mais elle n’a pas manqué de faire fortement réagir les étudiants concernés, qui avaient pour la plupart déjà fini les partiels et dont certains étaient déjà partis en vacances. La contestation a été si forte que le directeur du département licence de l’EDS, le professeur Nicolas Warembourg, a pris la peine de s’adresser directement aux étudiants en des termes particulièrement catégoriques :

Madame, Monsieur,

Cette question ayant fait l’objet, parmi les étudiants de troisième année de Licence, d’un certain nombre d’interrogations, je reviens à vous pour apporter quelques précisions utiles.

Je vous confirme que par décision du jury compétent a été prononcée souverainement l’annulation de l’épreuve de droit international public (sans T.D.) du lundi 15 janvier à 18h., tenue dans le centre d’examens d’Arcueil, à laquelle vous aviez été convoqués.

En conséquence, par application des dispositions du Règlement des examens adopté par la CFVU le 12 novembre 2020, relatives aux « circonstances exceptionnelles, » une convocation formelle vous a été dressée selon les voies réglementaires afin de repasser l’épreuve annulée.

Pour mémoire :
Règlement des examens – CFVU, 12 novembre 2020
Cliquez sur le lien ci-dessous :
[lien vers le règlement des examens]

Sous réserve du cas d’étudiants en mobilité, cette convocation vous est opposable, elle n’est susceptible de faire l’objet d’aucun aménagement, pour quelque motif que ce soit. Le calendrier des examens a été adopté et publié par les instances de l’université, il nous est à tous opposable.

Je vous rappelle que le département de la Licence en droit organise, pour chaque session d’examens, près de quatre-vingts épreuves en Licence et, pour chacune de ces épreuves, il doit planifier les aménagements personnalisés auxquels ont droit les étudiants en situation de handicap. Le manque de locaux a conduit l’université à planifier certaines épreuves à l’extérieur de Paris intra muros, notamment au centre d’examens d’Arcueil : le département de la Licence met en oeuvre cette décision dictée par les impératifs du service, quand bien même elle alourdit considérablement les contraintes réglementaires et logistiques.

Il n’est sans doute pas normal qu’une liasse de sujets reste au coffre, au centre Lourcine, au lieu d’être transportée à Arcueil, mais nous constatons avec regret qu’en dépit de tout un protocole mis en place pour prévenir ces incidents, l’erreur humaine demeure toujours possible.

Enfin, je me permets d’insister sur un point.

Moins que le temps pris pour imprimer dans l’urgence des sujets manquants, l’annulation d’une épreuve peut être imposée par le comportement des candidats eux-mêmes, en particulier par le non-respect de certaines consignes, comme l’interdiction de communiquer avec les autres candidats. Ces comportements sont susceptibles de compromettre la sincérité d’une épreuve, ils consomment une rupture d’égalité entre les candidats, leur constatation grève d’une irrégularité sérieuse l’épreuve concernée.

Cette mésaventure sera peut-être l’objet d’une utile réflexion sur le respect nécessaire de la discipline collective, sans laquelle aucun service public ne peut fonctionner ni aucun examen se tenir régulièrement. Pour tout étudiant en droit, il doit s’agir d’une évidence.

Je vous souhaite donc bon courage pour vos ultimes révisions et vous adresse des voeux de succès pour cette dernière épreuve.

Nicolas WAREMBOURG
Directeur du département Licence de l’EDS

Même si les dispositions particulièrement claires du règlement des examens a fait rapidement redescendre la contestation étudiante, une telle situation n’aurait pas dû se produire en premier lieu. Ce manqué illustre selon moi le danger que représente l’externalisation des partiels vers des lieux tiers et, plus largement, les conséquences désastreuses du manque de moyens des universités sur les conditions d’étude (et donc indirectement sur la qualité des diplômes…).

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